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dimanche, mai 06, 2012

Bad Religion : Critique du coffret (6e partie).

« Stranger than Fiction »

Ensuite, l'album « Stranger than Fiction » a vu le jour et c'est à la sortie de cet album, soit en 1994, que tous les doutes se sont estompés. Bad Religion était en plein contrôle de ses moyens et continuait d’élever les standards de qualité à atteindre en ce qui attrait au punk rock.

La formation devenait petit à petit la référence ultime et continuait indubitablement à se définir comme la formation punk la plus influente de toute sa génération.

«Stranger than Fiction» est un de mes albums favoris de toute la discographie de Bad Religion et je ne peux absolument pas quantifier le nombre de fois que j’ai écouté cet album. Et ça, c'est sans compter les rachats de la cassette ou du CD (tellement ma copie était amoché!) Sérieusement, je vous le dit, «this is heavy dope» comme dirait l’autre.

Aussitôt la première piste amorcée, vous savez que vous avez affaire à un album incomparable. La puissance de l’introduction d’ « Incomplete », premier morceau du 33 tours à se filtrer un chemin vers la sortie audio, vous laissera fébrile pour la suite. La force du texte et des métaphores utilisées dans cette chanson sont franchement épiques et quand vous serez arrivé au deuxième couplet, vous tomberez littéralement en bas de votre chaise. En fait, les textes de «Stranger than Fiction» sont si brillants que le tout en vient aberrant par moment.

«Stranger than Fiction» est un album d’une rare poésie et bourré de textes à caractères existentielles et philosophiques. Il s’intéresse au mystère qu’est la vie («Marked», «What it is?») et aux démons qui attendent patiemment de nous dévorer de l’intérieur si on ne les confronte pas («Tiny voices» et «Slumber»). L’hypocrisie de nos sociétés et de sa guerre des classes nous est aussi révélée avec affront, esprit et dissension («The handshake» et «Inner logic»). Mais là où «Stranger than fiction» tire toute sa pertinence est dans la subtilité de sa capacité à remettre en perspective la véracité de certains concepts qu’on croit solidement inébranlable.

Il détruit les supercheries ontologiques et les dogmes qu’on tente à chaque jour de nous infliger et accuse la paresse intellectuelle («Television») de créer une armée d’automate nulle de toute volonté à remettre en question ses propres convictions et d’accepter naïvement les idées préconçues des figures autoritaires en place («Leave mine to me» et «Individual»). J’irais même jusqu’à dire que certaines chansons sont des chefs-d’oeuvre d’exemple de leur savoir-faire et de leur génie. Ainsi, sur l’excellente «Better off dead» (à mon humble avis de vieux punk ratatiné, une des plus grandes chansons jamais écrites) nous avons droit au mea culpa du tout puissant lui-même qui n’arrive pas à croire que l’usage du libre-arbitre et l’environnement duquel il a doté sa création (l’homme et l’univers) est malencontreusement devenu son tourment quotidien et la perte de celle-ci. Cette chanson est d’une tristesse sans pareil et, pour tout dire, «Stranger than fiction» est un album excessivement déprimant qu’il faut éviter en moment de détresse. Il joue sur le moral comme le fait un chaton avec une pelote de laine, et cest-à-dire beaucoup.

Finalement, sur le huitième album de la formation, on revient à une formule un peu plus classique au niveau des compositions. On expérimente un peu moins les sonorités et on se concentre plutôt à la livraison de morceaux formatés dans un style beaucoup plus proche de ce qui nous avait été offert avant «Recipe for hate». Ils ont d’ailleurs réenregistrer «21st century digital boy» qui deviendra leur plus grand succès commercial à ce jour.

C’est aussi l’année où parut «Stranger than fiction» que le punk rock fut révélé au public et qu’il innonda la radio FM de ses airs contestataires. De ce fait et avec les ventes d’albums qui explosaient partout à la grandeur de l’Amérique, c’est à ce moment qu’Epitaph Records prit son réel essor et commença définitivement à s’imposer comme une des plus grandes étiquettes de disques indépendante de toute l’industrie. En conséquence, Brett Gurewitz dût prendre la décision de quitter Bad Religion pour s’occuper de son entreprise; il quitta la formation avant même que la tournée internationale où la formation allait supporter «Stranger than fiction» ne soit commencée. À l’époque, plusieurs rumeurs voulaient qu’il n’y avait pas que l’explosion d’Epitaph qui porta le guitariste fondateur de Bad Religion à quitter mais aussi un manque de communication entre les membres et de la frustration accumulée dû aux problèmes toujours grandissants de consommation de drogues de Gurewitz. Bad Religion est toujours demeuré évasif sur cette question, mais peu importe, le but n’est pas d’en faire le procès ici. Il fut donc aussitôt remplacé par Brian Baker (Minor threat, Dag Nasty) qui reste encore à ce jour un des deux ailiers-droits de Greg Graffin sur les planches.

« The Gray Race »
Ceci étant dit, Mr. Brett Religion à l’extérieur du coup pour la première fois depuis 1980, Greg Graffin s'est vu laissé à lui-même pour écrire la totalité du prochain album et nous avions amplement le droit de nous questionner à savoir s’il allait être en mesure de livrer la marchandise. La réponse fut relativement positive et «The Gray Race» fut lancé via Atlantic deux ans après la parution de «Stranger than Fiction», soit en 1996.

«The Gray Race» est donc le neuvième album de la formation et le premier où un producteur extérieur participera à l’enregistrement. En effet, la chaise vide laissée derrière la console qui était habituellement occupée par le propriétaire d’Epitaph Records se devait d’être comblée et Bad Religion arrêta son choix sur Ric Ocasek (Weezer, No Doubts, etc.) pour assurer la position. L’expérience sonore n’en fut pas amoindrie, mais jamais (à mon sens) elle n’égalera celle de «Recipe for Hate». Je dirais même que le son est étouffé en général, comme si on avait oublié de mettre un peu de «treble» ou qu’on avait placé une oreiller devant les micros; il manque un petit quelque chose.

Hormis ce fait, on pourrait dire qu’il y a deux lignes directrices qui forment la thématique de «The Gray Race». D’un côté, on dénonce la manière éhontée avec laquelle nous nous réfugions beaucoup trop facilement dans l’idolâtrie fanatique de figures emblématiques sans intérêt («Spirit Shine» et «Come join us») qui devraient nous bénir dans l’unisson pacifique mais qui deviennent plutôt les responsables du fait qu’ils nous plongent dans l’ignorance. Ils laissent une marque indélébile sur le regard que nous portons vers autrui et sur nous-mêmes nous laissant ainsi effrayés de nos différences et de l’inconnu («Them and us»).

De l'autre côté, l’effondrement social dû à l’aliénation progressive de nos vies vers l’ère numérique précipite le citoyen dans un gouffre qui le transforme en un acteur inconscient et insouciant exempt de toute réponse critique face au monde qui l’entoure («A walk» et «Nobody listens») et qui, alors, ne peut plus se porter garant de la stabilité des structures et des fondations qu’il s’est lui-même imposée.

Ainsi, Greg Graffin nous interpelle de la façon suivante : La condition humaine et l’absurdité de son endoctrinement par la nature perverse avec laquelle nous choisissons d’édifier nos sociétés, dans la complaisance passive et dans l’acceptation de vérités prématurées ainsi que l’avancement technologique qui nous distance les uns des autres et détruisant du même coup le tissu social qui nous unis («The Gray Race»), ne réussissent-ils pas à nous dénaturaliser et anéantir toute forme de conscience collective en rejetant nos existences dans l’incompréhension de nos semblables et, de ce fait, dans la futilité la plus abjecte? Ne sommes-nous pas devenus que l’ombre de nous-mêmes ?

Mais ce ne sont pas toutes les chansons qui respectent ces lignes directrices et nous avons droit à quelques petites exception, en autres avec «Punk rock song», «Ten in 2010» et « Pity the dead». Cependant, chaque morceau garde en tête la perspective de la race grise, en l’occurrence la nôtre.

Pour ma part, « The Gray Race » est loin d’être un de mes préférés. La formule musicale de Bad Religion est toujours bien présente et même si la charge émotive est bien sentie tout au long des quinze titres proposés, je trouve qu’il s’essouffle en cours de route et qu’il devient rébarbatif et ennuyant. Il contient toutefois deux des plus mémorables morceaux de leur discographie, soient «Parallel» et la très célèbre «Cease».

C’est donc sur cette note que je vous laisse pour cette sixième partie de la critique du coffret trentième anniversaire de Bad Religion. Restez sur le qui-vive puisque la prochaine fois, nous continuerons d’explorer les deux albums restant à paraître sur Atlantic Records, soient «No Substances» et «The New America» et, par la suite, nous conclurons sur le retour de Brett et la renaissance de Bad Religion.

La suite prochainement sur LaPunkerie.tk!

(Écrit par : Coeur Noir)

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Site Web : Badreligion.com
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